Jacques-André Haury Jacques-André Haury - médecin et député
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Ecole, sexe et violence: qu’attend-on pour parler de modèles?

Paru dans 24 Heures le 16 janv. 2007

Faites l’expérience vous-même. Vous demandez à un enseignant d’expliquer la nouvelle pédagogie; après trois minutes, il vous parle de la marche: «Regardez comment un enfant apprend à marcher! Il tâtonne, il tombe à gauche, il tombe à droite et il découvre l’équilibre. »

C’est l’exemple culte du socioconstructivisme, qui sert de grille de base au raisonnement de tous nos pédagogues. Juste un problème, un petit: l’histoire rapporte quelques exemples d’enfants sauvages, c’est-à-dire d’enfants qui, abandonnés par les humains, ont grandi au milieu des bêtes. Comment marchent ces enfants? A quatre pattes! Pour se tenir debout, le petit d’homme a besoin d’adultes qui lui servent d’exemple.

Et voilà probablement la clé du problème. Lorsqu’on prétend pratiquer une pédagogie sans modèle, l’enfant a beau tâtonner, il n’apprend pas. Si cette pédagogie «centrée sur l’élève» n’atteint pas son but, c’est sans doute parce qu’elle présente une carence fondamentale: elle manque de modèles.

On peut ainsi comprendre pourquoi l’apprentissage du français échoue lorsque l’enseignement se fonde sur les «propres productions de l’élève». Il faudrait au contraire lui montrer un modèle, c’est-à-dire des textes bien écrits par d’autres, des écrivains, des adultes.

Et vous pouvez transposer cette réflexion à toute la démarche éducative. Lorsque l’enfant a devant lui des parents ou des enseignants qui s’emploient à lui servir de modèle, il parvient à construire sa personnalité; il parvient à trouver ses repères. Tous les enfants ont accès, aujourd’hui, à des films montrant la violence ou la pornographie.

Mais tous les enfants ne deviennent pas violents ou violeurs sous l’influence de ces images. Ceux qui ont reçu un modèle, un exemple, un schéma de vie qui distingue le bien du mal, sont capables de comprendre qu’il y a des choses qui relèvent du mal et qu’on ne fait pas.

Ces réflexions, qui paraissent tomber sous le sens, on aurait pu les attendre des «chercheurs» en psychologie et en sciences de l’éducation qui inspirent le Département de la formation et de la jeunesse. Ce sont eux qui devraient avoir l’honnêteté de chercher à comprendre pourquoi les théories héritées de Piaget sont en échec.

Las! Une récente brochure publiée par la CIIP* est révélatrice de l’aveuglement qui les éclaire: on ose écrire que si «Maîtrise du Français», la fameuse méthode tant décriée, doit être mise à jour, c’est parce que les conditions sociales ont changé! Pas le début d’une critique de la méthode elle-même. Pas la moindre remise en cause des dogmes de base.

Et lorsque ces mêmes chercheurs s’inquiètent de la dérive de certains comportements chez les jeunes, pas une voix, dans ces milieux officiels, qui oserait remettre en question la pédagogie de la découverte et du tâtonnement pour la remplacer par un système dans lequel l’adulte dirigerait l’élève dans sa recherche de la vérité, du bien, du beau, du juste: ce serait «moralisant», l’affreuse idée! Or là est bien toute la question: reconnaître que l’enfant a besoin de modèles, c’est reconnaître aussi la nécessité de la morale.

On attendait d’Anne-Catherine Lyon la force d’imposer autour d’elle cette démarche critique honnête. Mais elle n’est pas parvenue, pendant sa première législature, à se libérer et à libérer notre école du dogmatisme aveugle qui règne parmi les élites de son département.

Dogmatisme aveugle que l’on retrouve souvent, hélas, dans les partis de gauche. Tout comme aux comités de la Société pédagogique vaudoise et de la moribonde Association des parents d’élèves, très proches du Parti socialiste.

Osons rêver: Anne-Catherine Lyon nous réserve peut-être cette bonne surprise pour son second mandat. 

* CIIP: Conférence intercantonale des directeurs romands de l’instruction publique




 

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